Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
acnordpasdecalais.overblog.com

AC Agir ensemble contre le chômage: association qui vous aide dans vos démarches lorsque vous êtes en période de chômage

Quand pôle Emploi se met à faire des canulars

Des chômeurs piégés par de faux entretiens d’embauche

Deux producteurs tournent actuellement une caméra cachée à Lausanne. Une pratique jugée scandaleuse par un des candidats.

1/2 Les producteurs ont posté leur annonce sur plusieurs plates-formes d'offres d'emploi en Suisse.

«Chacun choisit s’il veut être diffusé»

Louis-Maxime Renaud défend sa nouvelle émission. Il a répondu à nos questions par mail.

Quel est votre objectif avec ces caméras cachées?

Faire un état des lieux du monde actuel de l’emploi en Suisse. Je pense que cette émission fera un buzz qui nous dépassera un peu, mais elle nous permettra surtout d’attirer l’attention de manière originale sur l’importance du respect de l’humain lors du recrutement.

N’avez-vous pas l’impression de tromper les gens en leur faisant miroiter un travail qui n’existe pas?

Nous avons un employé au sein de la production qui replace les candidats qui sont venus aux entretiens. Au final, nous trouverons des opportunités pour près de la moitié des candidats auditionnés, peu importe qu’ils aient accepté ou non d’être diffusés.

Que répondez-vous aux personnes qui se plaignent de s’être fait avoir?

Une fois qu’on a annoncé la caméra cachée, chacun choisit librement s’il veut être diffusé ou si nous détruisons les images. Nous comprenons que certaines personnes soient mécontentes de ne pas avoir eu d’emploi après cet entretien, surtout si c’était aussi le cas lors des entretiens traditionnels qu’ils ont passés auparavant.

«Cela fait quelques mois que je cherche du travail, alors quand on me fait miroiter un poste de cadre avec une bonne rémunération, j’y crois, forcément.»

Le 4 février, Alexandre* se réjouissait d’être convoqué à un entretien d’embauche pour une place dans une nouvelle entreprise qui va ouvrir ses portes dans le canton. Mais, après une quarantaine de minutes d’un entretien plutôt classique, le recruteur annonce: «Vous êtes victime du coup du Caribou!» Cet habitant du canton de Vaud ne comprend pas immédiatement ce qui se passe: «Je ne connaissais pas ces caméras cachées.»

Le Caribou, alias Louis-Maxime Renaud, est un Canadien connu en Suisse romande pour avoir piégé des personnalités comme Bastian Baker ou Daniel Brélaz en se faisant passer pour un journaliste étrange dans des caméras cachées diffusées par La Télé et 20minutes.ch.

Cette fois, face aux candidats piégés, le Québécois endosse le rôle d’Eric Mifroy, spécialiste RH. A la fin de l’entretien, les coproducteurs de l’émission expliquent à Alexandre qu’ils réalisent un reportage qui sera diffusé sur le site internet du quotidien 20minutes.

Deux caméras, bien visibles, enregistrent l’entier de l’entretien sous prétexte de filmer la rencontre pour les responsables RH de l’entreprise aux Etats-Unis. Deux autres appareils sont dissimulés dans la pièce, un dans le plafond et un autre dans un classeur.

«Un réel choc»

«Lorsque le pseudo-recruteur m’a annoncé triomphalement que c’était un entretien fictif, je ne savais pas si c’était un nouveau test ou la réalité. Ce moment a été un réel choc.» Quand on lui soumet des formulaires à remplir pour autoriser les coproducteurs à utiliser publiquement les images filmées pendant l’entretien, Alexandre n’est pas vraiment remis de sa surprise et répond qu’il va réfléchir.

On lui assure que la plupart des autres candidats ont ri, qu’ils ont signé le formulaire d’autorisation. Ce que maintient Louis-Maxime Renaud, affirmant que notre témoin fait partie des exceptions. «Vous verrez en découvrant l’émission que l’immense majorité des candidats passent un bon moment et qu’ils rient de bon cœur lorsqu’ils apprennent que c’est une caméra cachée.»

Autre son de cloche du côté de la réception du World Trade Center, où se déroulent actuellement les entretiens. «On a vu beaucoup de personnes repartir déçues, témoigne une employée de l’accueil. C’est délicat, les gens viennent se plaindre auprès de nous, mais nous ne sommes pas responsables de ce qui se passe dans les bureaux.»

D’autres intervenants sont impliqués malgré eux dans cette affaire: les sites internet d’offres d’emploi sur lesquels les producteurs ont publié leur annonce. L’un d’eux, la plateforme jobs.ch, certifie qu’elle vérifie les contenus postés. «L’annonce de HiddenHire avait bien attiré notre attention et nous nous sommes assurés directement auprès de l’annonceur de son authenticité. Ce dernier, qui donnait une impression sérieuse et professionnelle, nous a confirmé que les postes proposés existaient. Mais il avait manifestement la volonté de nous tromper, de même que les candidats.»

«On profite de la détresse des chômeurs!» «Comment peut-on plaisanter avec ces choses-là? s’insurge Alexandre. On profite de la détresse des chômeurs, c’est un scandale!» Les producteurs, qui ne souhaitent pas dévoiler le concept de leur émission, assurent que le résultat final n’aura rien d’humiliant. «Notre émission sera certes drôle et divertissante, mais nous voulons également faire un état des lieux du monde actuel de l’emploi en Suisse», affirme Louis-Maxime Renaud.

«Il s’agit d’un reportage en immersion», précise Jonas Schneiter, coproducteur de l’émission. «Notre but est d’utiliser ces caméras cachées pour permettre de voir par le trou de la serrure ce qui se passe malheureusement trop souvent lors des recrutements», explique le Caribou. Dans les faits, ces entretiens sont pourtant factices.

Selon le témoin, les producteurs auraient affirmé à la fin de l’entretien que leur émission serait diffusée sur le site internet du journal 20minutes, ce que nient les intéressés. Philippe Favre, rédacteur en chef du quotidien, répond que des négociations sont en cours. Cependant, il spécifie que le contenu éditorial est vérifié, et qu’une émission jugée inadéquate ne serait pas diffusée. «Pour l’instant, nous n’avons rien visionné», précise-t-il.

Une pratique critiquée

Reste que la pratique peut sembler contestable. «L’auteur du canular profite non seulement d’une situation dans laquelle une personne se livre à l’évaluation de son parcours de vie, mais le fait également sur un principe implicite de confiance lié à un contexte supposé authentique», analyse Ysaline Favre, psychologue à l’Institut de médecine du travail. «Jouer de l’investissement émotionnel et de la confiance du demandeur d’emploi est une pratique pour le moins peu délicate.»

Les avis sont sévères. Seule la diffusion de l’émission au printemps permettra à chacun de se faire sa propre opinion.

* Prénom d’emprunt

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article